En menant son équipe Vitality à la victoire aux IEM Winter 2021, Dan "apEX" Madesclaire a un peu plus marqué l'histoire de CS:GO. La statistique semble iréelle et pourtant elle est, en fait, en cours depuis plusieurs années : le leader français a gagné un tournoi d'ampleur internationale chaque année depuis 2013, première annuité complète sur le quatrième opus de Counter-Strike. Un record mondial dont il est le seul détenteur et qui mérite sans doute un peu plus de lumière tant il dit beaucoup de sa régularité au sommet.

Nous avons souhaité revenir un peu plus en détail sur ce qui est devenu le palmarès français le plus impressionnant de l'histoire de Counter-Strike. Parlons gros sous tout d'abord : apEX était devenu le Français ayant remporté le plus de cashprize de l'histoire il y a quelques temps déjà en devançant un ex-coéquipier, Nathan "NBK" Schmitt, dont les dernières années dans le giron d'OG lui ont été fatales. Le Lorrain s'assoit désormais sur un joli magot de 923 635 $ de gains selon les chiffres fournis par esportsearnings.com. Un montant qui ne fait de lui que le seizième du classement général, largement dominé par l'ancien trio fondateur d'Astralis composé de dupreeh, dev1ce et Xyp9x, qui avoisinent quant à eux les 2 millions de dollars.

Mais tout aussi rentables fussent les victoires danoises, personne n'arrive à la cheville du capitaine de Vitality sur le plan de la régularité. CS:GO achève bientôt sa neuvième année complète et seul un être humain a réussi l'exploit titanesque de remporter un tournoi international dans chacune de ces années. Difficile de trouver meilleure statistique pour illustrer une carrière décidement tournée vers les trophées.

Petit retour en détail sur un impressionnant record.

2013 - Dans l'ombre de VeryGames

Victoires internationales : Prague Challenge, ESWC.

Clan Mystik à l'ESWC 2013 (HaRts, KQLY, apEX, kioShiMa, ioRek)

Difficile d'exister dans l'ombre de VeryGames durant cette période où l'écurie tricolore récoltait tous les suffrages. Pourtant, d'abord en compagnie de Team-LDLC, apEX marquera une première fois l'histoire en faisant partie des premiers Français à battre NiP... avant VeryGames. Ce n'est toutefois pas avec cette formation à fort potentiel, mais au destin tragique, qu'il posera le premier jalon d'une série folle. En fait, si l'on considère le Prague Challenge de juillet 2013 comme une lan d'ampleur internationale, c'est dans un mix pour le moins surprenant, avec TaZ, NEO et kennyS, qu'apEX a débloqué son compteur en battant - joli clin d'oeil à l'actualité - Natus Vincere en grande finale.

Mais si nous devions nous souvenir d'un seul événement cette année-là, il s'agirait bien sûr de l'ESWC, organisé en marge de la Paris Games Week. Atterri chez Clan-Mystik après la dissolution de Team-LDLC, apEX contribuera considérablement au sacre mondial, et surprise, de sa nouvelle écurie devant les meilleures équipes de la planète de l'époque dont VeryGames, Astana Dragons ou encore Ninjas in Pyjamas.

2014 - Remanié et bouleversé mais toujours victorieux

Victoires internationales : DreamHack Valencia, DreamHack Stockholm II.

Titan à la DH Stockholm Invitational II (kennyS, apEX, Ex6TenZ, KQLY, Maniac)

Revenu chez Team-LDLC dans un nouveau projet en début d'année 2014, apEX sera d'abord abonné aux places d'honneur avant d'enfin convertir l'essai lors de la modeste édition 2014 de la DreamHack Valencia. C'est une victoire internationale mais loin d'avoir la saveur d'un événement du "Tier 1", d'autant plus quand on connaît la suite de l'histoire et ce parcours aussi héroïque que déprimant au Major de Cologne, un mois plus tard.

Au centre du grand remaniement de fin d'été, apEX finit chez Titan où il retrouve Ex6TenZ et kennyS. Si c'est bel et bien la nouvelle version de Team-LDLC qui marquera le circuit de son empreinte, on a tendance à oublier que c'est Titan qui a donné la meilleure impression les premières semaines en remportant notamment la DreamHack Stockholm II face à ses rivaux domestiques en grande finale. Un maigre lot de consolation pour une épopée conclue prématurément suite aux affaires de tricherie impliquant KQLY et la disqualification de la DH Winter 2014, prochain Major à venir.

2015 - L'incontournable

Victoires internationales : IEM Gamescom, DreamHack London, Gfinity Champions of Champions,
DreamHack Cluj-Napoca.

EnVyUs à la DH Cluj-Napoca (kennyS, kioShiMa, Happy, Next, NBK, apEX)

Une année faste qu'était loin de présager un premier semestre quasiment cauchemardesque. Membre d'équipage d'un navire nommé Titan en totale perdition, apEX a dû ronger son frein jusqu'à recevoir une offre venue du ciel. Plus précisément, des concurrents francophones, passés entre temps chez EnVyUs, qui leur ont envoyé, à kennyS et lui, une bouée de sauvetage salvatrice.

Comme vous le savez sans doute déjà, le chapitre EnVyUs a mieux débuté qu'il n'a fini. En trois mois, apEX et sa nouvelle équipe vont appliquer concrètement la théorie de la lune de miel, le laps de temps après un changement durant lequel l'euphorie et la motivation des troupes sont à leur maximum. Résultat ? Des victoires de tous les côtés et surtout son seul et unique sacre en Major, à Cluj-Napoca en Roumanie, devant Natus Vincere. Tiens, tiens...

2016 - Besoin de rien, EnVy de titres

Victoires internationales : Game Show Global eSports Cup S1, Gfinity Invitational.

EnVyUs à la Gfinity Invitational (apEX, NBK, kennyS, Happy, Next, DEVIL)

La Game Show Global eSports Cup, un événement dont le prizepool de 200 000 $ constituait un attrait bien plus important qu'un plateau d'invités relativement moyen. Un titre que l'on oublie facilement, dont l'impact principal a été d'accorder un sursis de quelques semaines au "problème kioShiMa", écarté ensuite de l'effectif au printemps.

Le recrutement de DEVIL a marqué le début de la fin de l'ère EnVyUs. Une erreur de casting qui n'accouchera que d'un seul trophée mineur, la Gfinity Invitational, où seules quatre équipes se sont affrontées. Vous l'avez compris, c'est un petit miracle que cette série record n'ait pas pris fin au cours de cette année 2016, mais la carrière d'apEX, c'est un peu ça aussi : des médailles d'or qui tombent au moment où l'on ne s'y attend pas.

2017 - Super apEX pour Super Team

Victoires internationales : Finales WESG 2016, DreamHack Tours, ESL Pro League S5, DreamHack Masters Malmö.

G2 Esports à la DH Masters Malmö (kennyS, SmithZz, bodyy, apEX, shox, NBK)

Mine de rien, c'est sous les couleurs d'EnVyUs qu'apEX rafflera sa part de prizepool la plus importante de sa carrière. 800 000 $ aux WESG histoire de mettre du beurre dans les épinards pendant un petit moment. Mais le niveau de jeu affiché durant ce tournoi suivi d'un ultime échec au Major d'Atlanta ont sonné le glas des ambitions tricolores. De ce constat plus que médiocre est arrivée l'idée d'une "super team" à la française. Et, bien sûr, apEX fait partie de la bande mise aux enchères et remportée par G2 Esports.

Les mauvaises performances en Major ont sans doute jeté une opprobre pas forcément méritée sur cette équipe. En effet, la super team G2 a quand même soulevé de sacrés trophées dont celui de la prestigieuse ESL Pro League puis de la DreamHack Masters Malmö, au milieu des meilleures équipes du globe.

2018 - Une abeille ambitieuse

Victoire internationale : DreamHack Atlanta.

Vitality à la DH Atlanta (RpK, ZywOo, NBK, Happy, apEX)

La scène hexagonale a mis un genou à terre lorsque la dissolution de la super team G2 a été actée. Si cette équipe ne réussit pas, qui d'autre le peut après tout ? Une certaine organisation française répondant au nom de Team Vitality entend alors bien redonner à la France ses lettres de noblesse. Pour ce faire, elle cible bien évidemment ZywOo, le nouveau prodige, mais aussi plusieurs joueurs présentés comme des vétérans, dont apEX. Ce dernier sera donc l'un des membres fondateurs d'une nouvelle équipe qui ne mettra pas longtemps à gagner puisqu'elle remportera la DreamHack Atlanta seulement un mois et demi après son officialisation.

Alors, certes, ce n'est pas l'événement le plus important de l'année, loin de là même, puisqu'aucune formation du top 10 mondial n'était engagée, mais un trophée reste un trophée, d'autant plus quand il a préalablement fallu se qualifier au tournoi principal. En outre, il s'agit également de la seule victoire française sur le plan international cette année-là, alors on prend.

2019 - Le renouveau

Victoires internationales : Charleroi Esports, cs_summit 4, Esports Championship Series S7, EPICENTER.

Vitality à l'EPICENTER 2019 (ZywOo, RpK, XTQZZZ, shox, ALEX, apEX)

Le pari de Vitality sera payant. L'écurie s'imposera rapidement comme numéro un dans son pays avant de très vite concurrencer les mastodontes hors de nos frontières. Des places d'honneur par-ci, par-là, puis très vite des premiers titres dont certains des plus importants de l'année hors Major, notamment les finales de la saison 7 des ECS et l'EPICENTER. Une superbe année pour le grand retour de la France sur le devant de la scène mondiale, qui consacrera ALEX en tant que leader mais aussi apEX comme élément indéboulonnable de l'effectif.

2020 - Appelez-le Capitaine

Victoires internationales : IEM Beijing Europe, Finales BLAST Premier Fall.

Coleader dans quasiment toutes ses équipes passées mais aussi véritable encyclopédie vivante du jeu, il n'était finalement qu'une question de temps avant qu'apEX ne devienne à son tour le meneur principal d'une équipe. Cependant, il ne s'attendait sans doute pas à obtenir cette énorme responsabilité de manière aussi abrupte. Pris de court, comme l'ensemble de l'équipe et de ses fans, par le départ surprise d'ALEX en début de pandémie, apEX a naturellement hérité de ce rôle autant primordial qu'injuste.

Comme si la tâche n'était pas assez lourde en l'état, voilà qu'on lui colle un jeune rookie sans la moindre expérience au haut niveau dans les pattes, misutaaa. Puis un second en octobre, Nivera. Le tout dans une rotation à six joueurs ! Le pauvre apEX a donc dû faire des miracles pour sa première année en tant que capitaine. Malgré toutes les épreuves, le défi sera relevé haut la main avec deux victoires coup sur coup à l'approche de l'hiver, aux IEM Beijing Europe et dans la saison d'automne du circuit BLAST Premier. Sur Internet, conditions sanitaires obligent.

2021 - La dernière danse

Victoires internationales : IEM Winter.

Vitality aux IEM Winter 2021 (XTQZZZ, ZywOo, Kyojin, apEX, misutaaa, shox)

Affaiblie par la décision de Valve d'interdire de fait les rotations à six joueurs, puis par le départ à la retraite de RpK, l'équipe Vitality a tout de même misé une fois de plus sur la jeunesse en recrutant un nouveau rookie en la personne de Kyojin. Cette fois, le challenge était de taille pour Captain apEX et les résultats encourageants ont mis du temps à arriver. Trop pour les patrons de la ruche qui auraient décidé de bouleverser la philosophie de leur équipe avant même que celle-ci ne quitte le PGL Major Stockholm sur un quart de finale correct.

Si apEX est bien conforté à son poste, celui-ci ayant l'entière confiance de ses dirigeants, ce n'est pas le cas de trois membres de l'effectif. Mis au parfum des plans pour la nouvelle saison 2022 à venir, les joueurs ont ainsi entamé une dernière danse en trois étapes, sans la moindre pression, histoire de laisser un beau souvenir et de passer quelques messages. Les deux premières se sont soldées par une belle grande finale à Copenhague pour les Finales BLAST Fall et, profitant de l'absence de Natus Vincere, une superbe victoire aux IEM Winter, à Stockholm. En attendant, pourquoi pas, un ultime exploit aux finales mondiales du circuit BLAST Premier 2021.

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Ni GeT_RiGhT, ni Xizt, ni device, ni Xyp9x, ni flusha ou encore JW n'ont réussi pareille performance dans l'histoire de CS:GO. Tous ont au moins connu une année vierge de toute victoire internationale. Neuf années durant lesquelles il a fallu redoubler d'ingéniosité, d'intelligence et de diplomatie pour se frayer un chemin vers le succès dans un monde aussi concurrenciel et redoutable que celui de CS:GO. Un record dont apEX est seul propriétaire et qui illustre une stabilité et une longévité d'ores et déjà exceptionnelles.

Que lui reste-il à aller chercher ? Alors qu'il approche des 29 ans - il les fêtera en février prochain -, apEX marche actuellement sur les pas des plus grandes légendes que Counter-Strike ait jamais portées. Cet article était consacré à CS:GO exclusivement. Or, en ajoutant son début de carrière sur CS:Source et ses victoires à l'i45 en 2012 et la MaxLAN en 2011, sa série s'étale en fait sur 11 années ! Le Lorrain n'est donc "plus qu'à" quatre ans d'égaler le Polonais Wiktor "TaZ" Wojtas qui, selon nos calculs, est le recordman de la catégorie toutes versions de Counter-Strike confondues avec 15 années consécutives ornées d'au moins une victoire internationale entre 2004 et 2018. Avant lui, apEX pourrait également retrouver les dieux vivants Patrick "f0rest" Lindberg et Filip "NEO" Kubski, arrêtés à 14.

Photos : DreamHack, Gfinity, EPICENTER, ESL