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Valve & l'ESWC : Une nouvelle approche
Cet ESWC nous aura appris pas mal de choses : qui domine la scène, quelles sont les forces en présence, comment sont utilisées les molotov au plus haut niveau ... Mais un autre aspect riche en enseignements qu'il faut relever sur la semaine de l'ESWC est l'approche de Valve pour ce premier événement d'envergure internationale : d'après le blog officiel, la moitié de l'équipe dédiée à Counter-Strike:Global Offensive était sur place, à Paris. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce week-end là, Valve a vraiment communiqué.
I - Les discussions avec les développeurs
Commençons d'abord par ce qui a été le moins visible, même si cela a été évoqué durant un After ESWC : l'invitation sur place par Valve de certains acteurs CSGO afin de discuter ensemble du jeu et de la compétition. Les informations principales ont été relatées dans ce blog en anglais. Elles concernent l'état actuel du jeu (les statistiques) mais aussi son futur (recul des armes, silencieux, molotov).
Dans un premier temps, les sacro-saintes statistiques de joueurs : argument massue qui permet aux plus simplets de faire des propositions douteuses en expliquant que si le nombre de joueurs semble faible, c'est probablement parce qu'ils ne sont pas écoutés.
Statistiques du 10 août au 6 novembre, peut mieux faire ?
Interrogé sur la question, Valve répond que ces chiffres ne donnent qu'un aperçu partiel de la situation : CS 1.6 n'est vraiment actif que dans des régions très précises du globe mais de manière importante, c'est comme cela que les pics de joueurs impressionnants sont atteints. Lorsqu'il s'agit de regarder du côté du nombre de joueurs uniques par jour, Source est en fait devant 1.6 depuis 2007 avec une marge confortable. Quant à GO, sur ce critère, il fait actuellement jeu égal avec 1.6. Pour comparer également Source et Global Offensive à leur sortie, Valve indique qu'après un mois l'aîné ne totalisait que 4.000 joueurs maximum par jour : de quoi relativiser la situation. Ils s'accordent à dire que les statistiques données sont trompeuses et qu'elles devraient être modifiées.
Poursuivons avec les points de gameplay abordés : le recul des armes, les mouvements, le silencieux et les molotovs.
j3Di le créateur du zBlock bien connu des sourceux a proposé il y a quelques semaines des modifications du recul et du mouvement, voici un sujet sur le forum VaKarM. L'accueil de ces réglages par les communautés 1.6 et Source a été dans l'ensemble très bon, il semblerait qu'il en soit de même du côté de Valve, ils disent en substance : "On est tout à fait ouvert à de nouveaux réglages, trouvez les valeurs qui vous conviennent et faites les nous parvenir pour que nous puissions les intégrer". Il va sans dire que si Ido Magal et son équipe peuvent donner une réponse qui semble à ce point trancher avec la prudence habituelle vis-à-vis des propositions de la communauté, c'est surtout parce qu'avec j3Di et RegnaM, ils savent à qui ils ont à faire et connaissent la qualité et le sérieux du feedback.
Pour ce qui est du silencieux, ils répètent qu'il est sur la "todo list" mais pas prioritaire, en fait ils identifient un souci qu'ils devront régler : si tout le monde s'accorde à dire que l'AK47 est supérieure à la M4, il n'en reste pas moins que le jeu est favorable à la défense, donc aux CT.
Répartition des rounds CT/T ESWC 2012 - Stats HLTV.org
À l'ESWC les molotov étaient utilisés mais même sans, les CT ont l'avantage comme le montre les statistiques HLTV.org de la DreamHack Valence. Tout cela pour dire qu'au-delà du débat molotov ou non, le jeu est plus simple en CT et c'est pour cela que Valve doit réflechir à une manière d'intégrer le silencieux sans pour autant avantager encore plus la défense.
De la même façon, les modifications apportées aux molotovs peuvent modifier l'équilibrage du jeu, c'est pour cela qu'ils vont tenter d'autres approches comme supprimer le tagging qui ralentit les joueurs pris dans le feu. Nul doute que les développeurs ont pu isoler les statistiques complètes de l'ESWC comme ils l'avaient fait pour la CPH 2012 et qu'ils en tireront les enseignements qui conviennent. En tout cas, il semble que ce soit leur volonté.
II - Valve fait sa propre couverture de l'événement
Tout au long de la compétition, le compte twitter officiel s'est enrichi d'environ 75 tweets : qu'il s'agisse de relayer les streams, les scores ou de mettre en avant son propre contenu. Avoir l'éditeur derrière son jeu dans les grandes compétitions est vraiment un atout majeur et Valve ne fait pas les choses à moitié : en lançant CSGO et en fonction de la journée de la compétition, vous pouviez avoir les fiches de matchs, les liens vers les streams anglais, français et allemands, les scores de la veille ou encore des liens pour télécharger les maps nuke_ve et mirage.
À gauche : Scores, fiches de matchs et streams au lancement
À droite : Toujours sympa, au cas où VG aurait oublié...
Il n'y avait donc pas que des membres de l'équipe de développement à l'ESWC mais aussi un community manager et des cameramen : ils ont dit avoir déjà enregistré des dizaines d'heures de rushs. Pour l'instant ils n'ont pas donné d'information particulière sur le but final de ces enregistrements, même si on sait que Valve se lance avec DotA 2 dans les documentaires et que sur CSGO la série Pro Tips suit son cours. Ils ont néanmoins profité de l'occasion pour faire un miniclip efficace de l'événement :
Un autre aperçu de ce qui nous attend, réalisé par Valve : une interview vidéo des joueuses UBINITED. Vous pouvez retrouver l'intégralité des photos prises par l'équipe de l'éditeur ici.
III - Une pierre deux coups : Valve fait la promotion de son jeu
Les joueurs avancés de Counter-Strike ont tendance à effectuer une dichotomie et mettre de côté les joueurs plus occasionnels, en oubliant de temps en temps qu'ils constituent la grande majorité des possesseurs du jeu. Valve a mené durant le week-end une opération intéressante : présenter CSGO à un public moins averti en profitant d'un évènement esport qui semble destiné à première vue à un autre public.
Comme nous vous l'avions indiqué, CSGO était gratuitement jouable du 1er au 4 novembre et bénéficiait d'une réduction de 33% jusqu'au 5. Très productive, la firme de Seattle en a profité pour publier une vidéo mettant en avant la Course à l'Armement, destinée d'après leur blog aux nouveaux joueurs de FPS. Pour autant ils espéraient aussi voir des joueurs d'anciennes versions, réticents au changement mais intéressés par l'esport, profiter du week-end gratuit pour suivre les matchs sur les GOTV comme l'indique ce tweet.
On a vu que comparer des jeux différents à partir des stats Steam n'était peut-être pas le plus pertinent selon ce que l'on cherche, pour autant on peut comparer les statistiques de CSGO lors de la sortie officielle et celles du week-end gratuit :
Le buzz a fonctionné, combien vont rester ?
Indéniablement l'opération a interessé et il est évident que beaucoup de personnes ont profité de la réduction pour acquérir le jeu. À titre de comparaison et là encore, elle vaut ce qu'elle vaut, vous pouvez visualiser un week-end gratuit et réduction 50% sur MW3 ici : on est dans le même ordre de grandeur.
Il est souvent reproché à Valve de sortir des jeux qui s'approchent davantage de la bêta que du produit final, difficile de dire le contraire pour Global Offensive : le MatchMaking qui est un pilier des jeux modernes est arrivé il y a peu et on a eu beaucoup de chance d'avoir pu obtenir les GOTV à temps pour les ESWC alors que les développeurs se focalisent depuis quelques semaines sur le Map Workshop.
Il y a en donc eu pour tous les goûts durant ce week-end et parmi la montagne d'informations, quelques indices à propos des mods sur lesquels la communauté et Valve collaborent sont venus se greffer sur l'opération promotion : Zombie Escape, Jail Break, Pirate Wars.
Conclusion
En restant objectif il est évident que l'implication de Valve devrait réjouir notamment ceux qui ont connu les débuts laborieux de Source mais aussi ceux qui espéraient une approche différente de l'esport quand des acteurs majeurs de la scène Source avaient été invités à Seattle.
Pourquoi ce changement ? Probablement plusieurs composantes : une d'entre elles est sans doute le travail d'Hidden Path sur CSS et notamment la collaboration avec certains membres de la communauté qui avaient d'une certaine manière "portés" le jeu pour qu'il reste à flot si longtemps, en particulier j3Di. Toujours présent sur GO, les développeurs savent à qui s'adresser et la pertinence de ses feedbacks, avec d'autres, ne pose plus d'interrogations.
D'une manière plus globale, il doit s'agir aussi et surtout de DotA 2 : à l'image du moteur Source utilisé dans de nombreux jeux sous diverses variantes, l'expérience acquise sur l'esport reste à la base un investissement en moyens humains et évidemment financiers. Si elle ne profite qu'à DotA2, l'intêret reste limité : les avancées effectuées doivent permettre de valoriser plusieurs produits Valve, d'autant plus que les The International sur DotA2 n'ont pas lieu tous les mois ... Par "expérience" il faut entendre community management, production de contenus vidéo (documentaires, couverture d'évènement, etc.) et bien sur tenue de tournois à l'échelle mondiale.
On a donc déjà vu sur CSGO une partie de ces compétences nous bénéficier et rien concernant The International, mais ils ne ferment pas la porte et éludent la question. Sur ce point là, il faut admettre que les contextes de DotA2 et de CSGO sont complétements différents : GO ne subit pas la même concurrence que le MOBA et a déjà un circuit bien installé, tout est en place pour que le dernier Counter-Strike se construise sereinement une scène esport et cela démarre plutôt correctement : pas de bulle, quelques sponsors sont convaincus, ça avance doucement mais sûrement. Ne pas être sous une perfusion administrée par l'éditeur dès la naissance, c'est peut-être un gage de longévité. Il suffira de voir ce qu'il adviendra de Shootmania.
Outil statistiques joueurs : SteamGraph